Des contrats sans avenir

Mauvaise surprise pour Aurore qui risque de ne pas voir son CAE renouvelé comme prévu en décembre prochain. Comme pour beaucoup d’autres bénéficiaires de contrat aidés un peu partout en France, une réduction budgétaire drastique récente et très discrète met en péril un plan de retour à l’emploi qui avait été élaboré sur deux ans.

Aurore face à l'incertitude de son avenirInquiète, mais néanmoins calme, Aurore retrace à grand trait son parcours de jeune salariée. Titulaire en juin 2005 d’un BEP vente action marchande au lycée du bled, elle part à 16 ans à la conquête de son premier emploi. Mobile, elle décide de tenter sa chance sur le bassin d’Arcachon. Pourtant, ses efforts répétés se heurtent sans cesse au mur du manque d’expérience.

L’envie de s’en sortir

De retour sur le bled, elle décide de passer un BAFA pour pouvoir au moins travailler pendant les vacances. Bien qu’étant jeune chômeuse depuis plus d’un an, elle ne trouve pas de financement pour la soutenir dans sa démarche et doit payer de sa poche sa formation. C’est lors du stage pratique qu’elle arrive à convaincre son employeur actuel. Celui-ci s’apprête à ouvrir des postes pour animer le CLAE (Centre de Loisirs Associé à l’École) de l’école primaire du bled. Aurore passe donc par un CIVIS (Contrat d’Insertion dans la Vie Sociale), tremplin qui semble obligatoire pour décrocher un CAE (Contrat d’Accompagnement dans l’Emploi) en mars 2007.

Jouant le jeu de ce type de contrat, l’employeur d’Aurore adosse le contrat de 24 heures par semaine à une formation gérée par le GRETA en vue d’obtenir le CAP petite enfance. Cette formation devra s’étaler d’octobre 2007 à mai 2008, à raison de deux journées de cours théoriques par semaine au bled-en-chef, à 70 km du bled, en plus du CLAE et des stages obligatoires en entreprise pour valider le diplôme qui lui permettra d’accéder enfin à un emploi pérenne. Avec les 700€ que lui rapporte son emploi aidé, Aurore a pu trouver un logement, mais elle doit tout de même faire des extras pour se payer le carburant nécessaire pour se rendre à sa formation.
Elle était confiante, elle se donnait les moyens d’entrer dans la vie active et était bien décidée à transformer durablement l’essai, même si le secteur de la petite enfance n’était pas son choix initial.

Un avenir hypothéqué

Mais il y a quelques semaines, tout bascule pour Aurore. Alors que son employeur demande le renouvellement pour 6 mois de son CAE, il est surpris de recevoir une fin de non-recevoir de la part de l’ANPE. Le CAE est un contrat soumis à convention entre l’employeur et l’ANPE, ne peut excéder 24 mois et peut être renouvelé deux fois. Étant donné que la convention en cours comprenait une action de formation s’étalant jusqu’au 22 mai 2008, cette décision surprend l’employeur d’Aurore qui décide de faire le forcing de l’administration jusqu’à ce qu’on lui fournisse une explication valable quant à ce brusque retournement.

Finalement, un agent lui confirme à demi-mot que les financements des contrats aidés se sont subitement asséchés et que les nouvelles directives enjoignent les agents des ANPE à ne plus signer aucun nouveau contrat aidé et à refuser le renouvellement des conventions des contrats en cours. C’est ainsi que dans un silence assourdissant, des milliers et des milliers de personnes qui étaient en train de s’investir dans le parcours du combattant de l’accès à l’emploi vont très prochainement se retrouver sans rien alors qu’ils pensaient avoir encore un peu de temps pour tenter de se construire une nouvelle trajectoire professionnelle.

En 2006, pas moins de 358 000 emplois aidés ont été signés dont 162 000 CAE. C’est à dire autant de personnes dont l’avenir vient de soudainement se résumer à un retour brutal à la case ANPE. En attendant le Contrat Unique d’Insertion, qui ne verra pas le jour avant 2009, l’ambiance est à la restriction budgétaire tout azimut, avec cependant, comme l’affirme le cabinet de Christine Lagarde, des renouvellements au cas par cas pour 2008. Autrement dit, la plus grande incertitude pour ceux qui espéraient avoir 2 ans pour faire leurs preuves.

Soutenue par son employeur et la Mission locale, Aurore a encore bon espoir de voir son contrat finalement renouvelé le mois prochain. Car si ce n’est pas le cas, elle préfère ne pas y penser. Sans revenus, à seulement 18 ans et demi, elle risquerait fort de perdre tout ce qu’elle a réussi à obtenir jusqu’ici : un logement décent (pour 400€/mois), une formation diplômante (3000€ qui ne seront plus financés en cas de perte du CAE) qui lui ouvre de plus larges perspectives d’emploi, et beaucoup d’espoir!

Post-scriptum : À l’heure où j’écris, j’apprends avec joie que l’employeur d’Aurore a obtenu un accord de principe pour le renouvellement du CAE. Cependant, la durée sur laquelle porte la nouvelle convention n’est pas connue à ce jour.

9 réponses à “Des contrats sans avenir

  1. Merci pour cet article très édifiant sur une situation révoltante. Merci aussi pour la petite fin qui nous réconforte sur le cas d’Aurore…

  2. Décidément, tous les articles sur ce blog aident à mieux comprendre la précarité.
    Mon fils a été intérimaire pendant deux ans. Depuis, il a été embauché. J’ai l’impression que ce n’est plus le même gamin, plus calme, plus confiant (pas plus aimable, mais ça, c’est un problème entre lui et moi !)

  3. Oui, enfin bon, elle avait envie de bosser, elle s’est bougé le derche et elle a fini par trouver un truc pas trop pourri pas trop loin de chez elle, malgrès le handicap de son jeune age.

    Comme 99% des gens dans son cas, quand on a vraiment envie, on trouve. Rien ne vient tout cuit. Vous voulez quoi les gauchistes ? Tous à 10 000 € mensuels à coté de chez soi, pas trop fatigant et qu’on vienne vous l’apporter sur un plateau ?

    Pfff…

  4. @ Sarkolâtre

    Les gauchistes ne sont pas maso. Pourquoi en faire baver à la jeunesse? Qu’est-ce que cela vous donne? N’avez-vous pas d’autres sources de plaisir?

    Les anciens mettaient un honneur à ce que leurs jeunes aient moins de difficultés qu’eux-mêmes avaient eu durant leur jeunesse. Cela signifiait que la société avancait vers plus de civilisation. J’ai l’impression en vous lisant que plus les gens sont abrutis par les difficultés et plus cela vous convient. J’ai peut-être mal compris. Pourriez-vous me dire le mérite d’un jeune qui a papa et maman derrière lui avec une petite fortune?

  5. salut a tous
    depuis la fin du mois de septembre j’ai rejoins le nombre des personnes en contrat aidé; plus précisément en contrat d’avenir, qui na effectivement d’avenir que dans le nom. Suite a la signature de ce contrat (je m’étais renseigné avant) je devait toucher des aides de retour à l’emploi. Conserver pour un temps le paiement des ASS, (aide spécifique de solidarité) mais également tocher une prime de 1000 euros au bout des 4 premiers mois, n’ayant pas le permit de conduire je ne vous fait pas un dessin.
    j’ai donc commencer mon emploi dans une structure de loisir et d’accueil d’enfant en péri et extra scolaire avec une petite lueur d’espoir d’avoir afin trouver un poste correct a 28 ans et déjà beaucoup de cdd ou contrat précaire en poche et pas que dans l’animation ( Intérim; industrie et même BTP en alternance pendant 2ans comme quoi). A ce jour je vous laisse faire les comptes toujours rien et ne croyez pas que je sois docile au contraire je me suis rendu a l’assedic à plusieurs reprise ( en stop ça va de soit elle a environ 15 kil) et ma facture de téléphone à pris une augmentation même avec les nouveaux forfaits afin de tirer la situation au claire.
    Au final je n’ai obtenu que la radiation des assedic (et oui je travail) sous prétexte que le maintien de ses aides n’ai réserver qu’au allocataire des ASS majorées soit pour les plus de 50 ans (a ce rythme je vais finir par y avoir droit hehe); de plus au dernière entretien du personnel ma directrice ma fait comprendre que au bout des 6 premiers mois je n’étais pas assé motivé et que je n’avait pas à me plaindre puisque de toute façon je n’étais pas son ami.
    Pour conclure ma petite histoire nous travaillons sur deux sites en milieu rural situés à 5 kil l’un de l’autre je fait donc les déplacement en stop. J’ai également déménagé pour me rapprocher de mon lieu de travail principal et j’adore mon métier dans le domaine éducatif qui remplis la plus grosse partie de mon cv.
    donc si un jour on vous propose un contrat aidé de quelque sorte que ce soit; en ce qui me concerne ne signer pas meme si comme moi vous ne supporter pas de rester à la maison à regarder les oiseaux par la fenetre
    bonne continuation a tous faut que j’me motive à finir à la rue ou a recommencer une foi de plus à zéro.
    j’espère de tous cœur que mon employeur qui n’est pas ma directrice heureusement m’apportera le même dénouement cas aurore mais la une foi de plus j’en doute.

  6. Pingback: Le contrat aidé qui ne vous aide pas « Equilibre précaire

  7. Et bien quand on voit l’histoire d’Aurore on se dit qu’il faut en vouloir pour pouvoir atteindre ses objectifs……alors quand on nous dit un contrat d’avenir je suis désolée il n’y a pas d’avenir, je suis dans une école primaire c’est ma deuxième année et je me dis que si tout s’arrete en décembre moi qui avait entamé une démarche de VAE pour le cap petite enfance et bien comme je n’aurai pas les trois ans, je ne pourrai avoir cette certification !!! alors où est l’avenir????? J’essaie de démarcher pour avoir alors une formation en centre mais apparemment peu le font et sinon ce sont des écoles privées alors qui finance ? certainement pas nous qui touchont environ 800 euros par mois ! alors quand on nous dit qu’il faut s’en sortir on veut bien mais il « ‘faudrait »‘ que l’on nous en donne les moyens (ps : jai 50 ans) !!!!!!

  8. bonjour,
    j’ai 45 ans et me retrouve devant le même problème, mon contrat prend fin, fin août et je ne sais toujours pas si oui ou non je serai renouvelée, mon patron ne sait apparemment pas non plus et va s’en occuper, je suis dans un Ets Scolaire.
    Et à mon âge, on n’est plus très jeune pour trouver un boulot, ça devient encore plus dur….

  9. Pingback: Au sujet des emplois aidés - Le Monolecte

Laisser un commentaire